Faut-il corriger le système des titres-services vu l’importance de la main-d’œuvre étrangère? Franck Vandenbroucke jette un pavé dans la mare. Mais en Wallonie et à Bruxelles, il fait un flop.
Les entreprises de titres-services puiseraient-elles trop souvent leur main-d’œuvre à l’étranger, laissant sur le carreau les demandeurs d’emploi belges? C’est ce que sous-entendait hier l’ex-ministre sp.a Franck Vandenbroucke, dans une carte blanche publiée dans "De Standaard". C’est lui qui a créé le système dans les années 2000. Mais à ses yeux, il a dévié de sa cible.
A l’heure actuelle, dit-il, 42% des aides ménagères payées en titres-services par les ménages flamands sont étrangères. Selon lui, cela pose un réel problème en matière d’équilibre financier. Car en allant chercher la main-d’œuvre à l’étranger, on augmente les coûts budgétaires du système (et on ne résout pas le problème du chômage).
Selon Franck Vandenbroucke, il faudrait supprimer la réduction fiscale offerte aux familles afin d’investir les moyens libérés dans une "forte hausse de l’embauche des personnes restées un certain temps au chômage ou à l’assistance sociale en Belgique".
Au cabinet du ministre flamand de l’emploi Philippe Muyters, on confirme qu’il y a une hausse du nombre de personnes d’origine étrangère employées dans les titres-services: 48% en 2016, contre, 45% en 2013, dont 17,7% viennent de pays hors UE, et 6,2% d’origine inconnue. Faut-il pour autant agir? D’après le cabinet Muyters, non, car cela contreviendrait à la règle de libre circulation des travailleurs. "Et si un jour on proposait cela, tout le monde dirait que nous sommes racistes", dit le porte-parole du ministre.
Pas de problème en Wallonie et à Bruxelles
À Bruxelles, le problème ne se pose pas. Comme en Wallonie, il existe une règle qui impose aux entreprises titres-services d’embaucher au moins 60% de demandeurs d’emplois ou bénéficiaires du revenu d’intégration sociale. En Flandre, cette règle a été supprimée il y a deux ans, car les entreprises peinaient à trouver de la main-d’œuvre.
En Wallonie, 87% des travailleurs titres-services sont de nationalité belge.
Dans la capitale, la main d’œuvre peu qualifiée et féminine (le profil classique de l’aide ménagère) ne manque pas… "Seuls 10% des nouveaux travailleurs du secteur titres-services n’étaient pas inscrits comme demandeurs d’emplois, et provenaient donc généralement de l’étranger", explique le ministre bruxellois de l’emploi Didier Gosuin. En 2016 à Bruxelles, seuls 17% des travailleurs titre-service étaient d’origine non européenne, 26% belges, 56,8% issus d’un pays européen.
Pour le ministre, le débat ne se pose donc pas comme en Flandre. Et la région incite d’ailleurs les entreprises à embaucher des personnes venant de chez Actiris. "Celles qui respectent cette règle de 60% de demandeurs d’emplois, et qui offrent une formation à leur personnel, bénéficient de l’indexation de la part de l’intervention publique", explique encore Gosuin. De quoi inciter à puiser dans la main d’œuvre présente sur le marché bruxellois. Preuve irréfutable que cela marche, 70% des travailleurs titres-services de la région sont… bruxellois.
En Wallonie aussi, le cabinet du ministre de l’emploi Pierre-Yves Jeholet explique que le débat n’a pas lieu d’être. "87% des travailleurs titres-services sont de nationalité belge, dit le porte-parole de Pierre-Yves Jeholet. 12% proviennent d’un pays européen, 4% d’un pays hors UE."
Federgon, la fédération des entreprises de travail intérimaire (un des gros prestataires de titres-services), a réagi à l’idée émise par Franck Vandenbroucke. "Démanteler le système serait une très mauvaise idée. C’est un des rares secteurs qui parvient à insérer des personnes très éloignées de l’emploi dans des fonctions peu qualifiées. Et si 42% des personnes sont d’origine étrangère, il faut plutôt qualifier le secteur de modèle à cet égard", conclut Herwig Muyldermans, directeur de Federgon.
Source: L'Echo